Des signes de stabilisation sur les marchés?

Axel Botte, Ostrum AM

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La baisse de 7,7% du marché de Shanghai, rattrapant l’ajustement mondial des indices, n’a pas déclenché de ventes supplémentaires.

© Keystone

L’accélération baissière des marchés boursiers en fin de semaine traduisait les craintes des intervenants avant la réouverture de Shanghai fermé depuis le 23 janvier. La baisse de 7,7% rattrapant l’ajustement mondial des indices n’a pas déclenché de ventes supplémentaires. Les marchés européens ouvraient en légère hausse lundi après une semaine difficile. Les emprunts d’état ont naturellement bénéficié de la recherche de sécurité. Le Bund s’échange sous -0,40%. Le relèvement de 5pb des taux de la Fed est passé inaperçu de sorte que le Tnote touchait 1,50% avant un rebond. En zone euro, les spreads de crédit et des dettes souveraines sont globalement inchangés. Le high yield subit des prises de profit (+24pb). Les primes sur la dette émergente s’élargissent d’un montant comparable à la baisse du T-note. La correction majeure concerne les prix des métaux industriels et les actifs connexes comme le dollar australien (0,67$). Le pétrole poursuit sa chute (56$ sur le Brent). Le yen est recherché à l’instar du dollar américain qui fait figure de principale valeur refuge.

Le graphique de la semaine

Le Coronavirus a provoqué un net décrochage des prix des matières premières.
La baisse anticipée de la demande dans le transport aérien pèse sur le prix du pétrole. La tendance baissière sur les prix du gaz naturel du fait des excédents de capacités s’en trouve renforcée.
La Chine représente plus de la moitié de la demande mondiale de métaux industriels. Le report de la reprise d’activité à mifévrier dans de nombreuses usines a un impact immédiat sur les prix du cuivre, de l’aluminium ou encore du Nickel.
Coronavirus: un choc asymétrique

L’épidémie de coronavirus occupe le devant de la scène. Elle crée une nouvelle incertitude liée à la disponibilité des statistiques chinoises dans les prochaines semaines. La lecture de la conjoncture sera rendue plus difficile. La reprise de l’activité industrielle a été reportée dans plusieurs régions chinoises. Le confinement d’une partie de la population et la prolongation des vacances scolaires font de cet épisode épidémique un choc d’une nature différente de la crise sanitaire du SRAS en 2003. Il y a 17 ans, l’entrée récente de la Chine dans le concert international ouvrait un flux d’investissement étrangers et assurait des débouchés aux entreprises sises en Chine. Le ralentissement économique avait duré à peine un trimestre avant le retour d’une croissance à deux chiffres. La crise actuelle frappe une économie chinoise dans laquelle les services et la demande interne jouent un plus grand rôle. La consommation de services va fléchir affaiblissant en premier lieu la distribution et le transport aérien, ce qui rendra nécessaire une politique économique volontariste. La crise est asymétrique mais la taille de l’économie chinoise en fait un enjeu mondial. Les effets collatéraux sont déjà palpables. Les restrictions sur les mouvements de population pèsent sur le transport et la demande de produits pétroliers. La mise en sommeil de l’activité industrielle provoque un plongeon généralisé des prix des métaux industriels. Le cuivre est ainsi en baisse de 10% en 2020. Cela a un impact direct sur le dollar australien déjà en proie au ralentissement de la demande des ménages. La pression sur la RBA est immense en amont de sa réunion de politique monétaire.

Croissance stable aux Etats-Unis

Aux Etats-Unis, la croissance économique s’est maintenue au 4T19. Le PIB a progressé de 2,1%Ta, malgré une contribution fortement négative des stocks (-1.09pp). Le ralentissement de la consommation des ménages et la contraction de l’investissement en équipement sont compensés par la baisse des importations, la recherche-développement, la vigueur de l’investissement résidentiel et la demande publique (notamment les dépenses militaires). La diminution des importations au 4T19 traduit en partie l’indépendance énergétique croissante de l’économie américaine. La production de pétrole atteint 13mbpj et se substitue naturellement aux importations. Les capacités de production excédentaires restent importantes d’où la faiblesse dans l’investissement en structures dans ce secteur et les pressions sur la profitabilité. Une nouvelle phase de consolidation est inévitable, ce qui sera bénéfique au plan macroéconomique.

Aux Etats-Unis, le positionnement acheteur
des gestions reste toutefois extrême.

En zone euro, la croissance déçoit au 4T19 (+0,1%T) notamment en France (-0.4%T) et en Italie (-0.3%T). Les enquêtes manufacturières laissent entrevoir une amélioration. L’inflation ressort à 1,4%A en janvier.

Le T-note sous les taux de la Fed

La recherche de sécurité soutient l’actif sans risque. Le T-note a rebondi sur 1,50% pour s’échanger désormais autour d’1,55%. Le FOMC a pourtant acté une hausse de 5pb de l’IoER à 1,60%. Cette action, ignorée par les marchés financiers, n’est pas anecdotique. La hausse renchérit immédiatement les opérations de repo qui ont par ailleurs été prolongées jusqu’en avril. Les achats de T-bills se poursuivent en parallèle à hauteur de 60 milliards de dollars chaque mois. La hausse de l’IoER et les achats de titres semblent deux politiques incohérentes. Le marché va sans doute tester la résistance de la Fed à une baisse des taux surtout si la PBoC entreprend d’assouplir sa politique. Le marché des Treasuries semble néanmoins avoir trouvé un équilibre de court terme malgré un portage défavorable. Les sondages ou le ratio des volumes de puts et de calls ne trahissent pas d’excès de positionnement sur les Treasuries. Les positions spéculatives vendeuses de contrats T-note ont diminué. Le spread 10-30 ans a peu bougé. Le seuil des 2% a été testé sur l’échéance 30 ans. Par ailleurs, la sensibilité des emprunts indexés à la baisse du pétrole est restée contenue. Le point mort américain à 10 ans est stable à 165pb. En zone euro, le Bund s’est apprécié, son rendement atteignant -0.44% flirtant avec les seuils techniques. L’amélioration des enquêtes limite le potentiel haussier mais une nouvelle accélération ne peut être exclue. Les spreads souverains sont en revanche totalement imperméables à la problématique du virus et aux mauvais chiffres de croissance. La syndication de 30 ans français a rencontré une forte demande de sorte que le Trésor abondera de nouveau ses emprunts à long terme cette semaine. La convexité est attrayante. Le spread 10-30 ans français s’échange à 78pb contre 50pb pour l’équivalent allemand.

Le crédit IG se traite à un spread moyen de 94pb contre Bund. Les mouvements sont restés limités malgré la baisse des actions. Les financières subordonnées perdent environ 0,3% en 2020. Parmi les nonfinancières, le transport sous-performe un marché dont les performances sectorielles restent très homogènes ailleurs. Le high yield s’écarte davantage mais sans panique à la vente. La majeure partie du rally de décembre a été effacée.

Les actions ont connu une accélération baissière en fin de semaine (-2%) dans l’attente de la réouverture des marchés chinois. La chute de 7,7% lundi à Shanghai n’a pas déclenché de nouvelles ventes. Aux Etats-Unis, le positionnement acheteur des gestions reste toutefois extrême. Les ressources de base et les pétrolières sont sanctionnées compte tenu de la baisse de leurs profits (-40%A environ) et de l’impact attendu du virus. Les services publics et la technologie surperforment conjointement. En Europe, les premières publications du 4T19 sont bien orientées. Le même schéma sectoriel se développe en Europe. L’automobile est aussi sous pression (-8% en 2020).

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