Déconfinement: premiers décomptes

Nicolette de Joncaire

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En Suisse, les modalités de distribution des aides bancaires ont été bien articulées Qu'en sera-t-il ailleurs?

Maintenant que nous pouvons retrouver les embouteillages et retourner chez le coiffeur, l’heure est venue de commencer à faire quelques comptes.

Tant aux Etats-Unis qu’en Europe, banques centrales et gouvernements se sont livrés à une surenchère de largesses. Côté Fed, 175 milliards de dollars de liquidités quotidiennes et des taux entre 0 et 0,25% Côté BCE, un programme d’urgence d’achats de dette publique et privée pour lutter contre les effets du confinement (PEPP) doté de 750 milliards d’euros et des taux directeurs à zéro. L’Union européenne peine encore à s’entendre sur son plan de lignes de crédits «de précaution» mais il est chiffré, en théorie, à 240 milliards d’euros. En France, un plan d’urgence économique de 110 milliards d’euros a été établi (dont près de la moitié pour financer le chômage partiel). En Suisse, un paquet d’aides de 40 milliards de francs permet de garantir crédits et prêts d’urgence. Les milliers de milliards de promesses publiques s’accumulent.

Reste à savoir comment cette générosité va atteindre sa cible. Rappelons qu’il avait fallu plus de quatre ans pour que l’assouplissement monétaire porte quelque fruit au niveau de l’économie réelle lors de la dernière crise. C’est en Grande-Bretagne dont le gouvernement avait été le premier, mi-2012, à se rendre compte que les fonds libérés par la banque centrale ne perfusaient pas l’économie que conscience fut prise de l’inefficacité des programmes nationaux ou internationaux si les banques ne peuvent pas jouer leur rôle de courroie de transmission. Pour preuve, rappelons que selon les chiffres publiés par la BNS, en Suisse, entre 2009 et 2013, le crédit affecté par ces dernières au fonctionnement des petites entreprises avait diminué de 35%, réglementation prudentielle oblige. Le crédit bancaire restant en Europe le principal levier de financement des entreprises, il convient donc de s’assurer que les mécanismes de transmission fonctionnent correctement.

La dette brute de la Confédération correspond à 13,9% du PIB.
Quant aux banques suisses, elles sont bien capitalisées.

En Suisse, il semble que, cette fois-ci, sous l’impulsion du Conseil fédéral, les modalités de distribution des aides aient été suffisamment bien articulées pour permettre une «mobilisation sans précédent» selon l’opinion d’Yves Mirabaud, Président de la Fondation Genève Place Financière, publiée dans Le Temps. Le programme d’octroi de crédits cautionnés aux petites et moyennes entreprises, entré en vigueur le 26 mars, et porté à 40 milliards de francs le 3 avril, a suscité beaucoup de demandes dès le début. «En moyenne, quelque 10’000 conventions de crédit étaient conclues chaque jour. Les banques travaillaient même le week-end pour traiter les demandes» explique l’Association suisse des banquiers sur son site web. Le rythme s’est ensuite ralenti à un volume actuel d’environ 1000 conventions quotidiennes. En fin de semaine dernière, «plus de 120'000 crédits avaient été accordés, pour un volume total de CHF 13,8 milliards».  A noter, le Crédit Covid-19 est limité à 500'000 francs et cautionné à 100% par la Confédération. Les fonds sont mis à disposition des entreprises à taux zéro (le Crédit Covid-19+, soit au-delà de 500'000 francs, porte un intérêt de 0,5% et est cautionné à 85%). Lundi, la BNS étendait les facilités de crédit Covid-19 aux cautionnements cantonaux, permettant aux banques d’étendre encore davantage les facilités accordées si nécessaire. Accompagnés d’un assortiment d’autres mesures (chômage partiel, prévention des faillites), ces prêts devraient permettre d’atténuer les retombées économiques du confinement.

Le compte 2019 de la Confédération s'est soldé par un excédent (de 3,1 milliards de francs) et sa dette brute correspond à 13,9% du PIB. Quant aux banques suisses, elles sont bien capitalisées.

La situation est loin d’être aussi favorable ailleurs. Qu’adviendra-t-il des promesses faites par ceux qui n'en ont guère les moyens?

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