Actions européennes: faisons preuve de prudence

Paul Casson, Artemis IM

2 minutes de lecture

Après 10 ans d’assouplissement monétaire, le passage au durcissement monétaire est brutal. La fébrilité des marchés est donc compréhensible.

Il est dangereux de rédiger des perspectives par les temps qui courent: presque invariablement, leurs lacunes sont impitoyablement et rapidement exposées. Cette année, le retrait des liquidités du système financier mondial confère un effet négatif persistant à cette tâche.

On serait tentés d’en rester là. Après tout, ce retrait inexorable des liquidités sera, selon nous, un élément central de la gestion monétaire tout au long de l’année 2019. Cependant, nos lecteurs ne seront probablement pas satisfaits par cet unique commentaire et celui-ci n’apaisera certainement pas notre rédacteur. Par conséquent...

Le cycle des liquidités

Il a fallu aux banques centrales 10 années d’effort concerté pour parvenir en phase basse (ou revenir à la phase haute, selon votre point de vue) du cycle des liquidités mondiales. On commence à en émerger et les réserves d’obligations détenues par les banques centrales diminuent, bien que lentement. Et même si le processus de ponction des liquidités ne devrait pas prendre une décennie, nous ne nous attendons pas à ce qu’il soit particulièrement rapide. Le marché haussier qui duré 10 ans pour presque toutes les classes d’actifs est désormais sérieusement menacé.

Presque tous les espoirs semblent reposer
sur les banques centrales.

Les taux d’intérêt sont en hausse. Il s’agit d’une procédure assez normale, même si elle a commencé à un niveau historiquement bas. Il n’a pourtant pas fallu longtemps pour que les cours de toutes les classes d’actifs diminuent en réaction à une telle situation. Un problème se pose donc: il ne s’agit pas de la dernière hausse des taux d’intérêt (et la BCE n’a même pas encore commencé).

La dette – des individus, sociétés et gouvernements – atteint des sommets. Et alors que nous ne sommes pas les seuls à le faire remarquer, nous n’avons encore reçu aucune explication crédible quant à la façon de gérer ce fardeau dans un contexte de taux d’intérêt plus élevés sans créer de problèmes à d’autres niveaux. Presque tous les espoirs semblent reposer sur les banques centrales: qu’elles réalisent que le relèvement des taux d’intérêt est une terrible erreur et qu’elles recommencent à injecter des liquidités dans le système pour continuer la fête

Prévisions de bénéfices en baisse et risque politique

Compte tenu de ce véritable tournant dans le contexte monétaire, une telle fébrilité du marché n’a rien de surprenant. La réaction négative du marché face aux avertissements sur les résultats pendant la période du troisième trimestre fut au moins aussi sévère qu’elle l’avait été de nombreuses années auparavant.

En outre, nous savons que certaines sociétés ont dû revoir à la baisse leurs prévisions quelques semaines seulement après leur premier avertissement sur résultats. Nous nous attendons à d’autres cas similaires en 2019. En dépit de l’élan insufflé par les allègements fiscaux aux Etats-Unis, les prévisions pour les bénéfices mondiaux ont baissé de façon constante depuis quelques mois et entraînent les marchés boursiers dans leur chute.

Des récessions peuvent se produire
sans se transformer en crise financière mondiale.

Le risque politique est difficile à quantifier. Nous estimons que, malgré sa présence ces quelques dernières années, ce risque a souvent été occulté par l’effet apaisant de l’assouplissement monétaire. Cette «protection» monétaire est désormais en train de disparaître et le coût des erreurs politiques sera proportionnellement plus élevé et plus douloureux.

À la recherche du positif

Que dirions-nous si nous voulions essayer d’être plus positifs? Des récessions peuvent se produire sans se transformer en crise financière mondiale. Cela signifie que même si les cours dégringolent, un rebond reste possible. Les banques sont bien mieux capitalisées qu’auparavant, de sorte que la prochaine crise ne viendra pas probablement pas d’elles. Pendant ce temps, les attentes en matière de bénéfices ont été partiellement reconsidérées ces dernières semaines et plusieurs secteurs du marché européen, comme celui des télécommunications, semblent offrir un potentiel de valeur et des perspectives de meilleurs résultats.

Ces raisons sont évidemment trop peu nombreuses pour que l’on puisse se réjouir. Mais il existe au moins des perspectives intéressantes en Europe - et pas uniquement pour les investisseurs qui, comme nous, sont en mesure de prendre des positions courtes.

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