Russie: la chute du rouble pousse la banque centrale à agir

AWP

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Le dollar a franchi le seuil des 69 roubles pour la première fois depuis avril 2016, lorsque la Russie était en proie à une crise économique et financière.

La monnaie russe, mise sous pression par le renforcement des sanctions américaines, est tombée jeudi à son plus bas niveau en plus de deux ans face au dollar, poussant la banque centrale à monter au créneau pour enrayer sa chute.

Le Kremlin a d'ores et déjà averti qu'il ne cèderait pas et riposterait à la dernière nouvelle salve de mesures punitives, entrée en vigueur mercredi et assortie de la menace d'un renforcement dans les mois à venir.

Mais si les autorités assurent que l'économie russe est devenue résistante aux chocs au fil du renforcement des sanctions ces dernières années, elles ont reconnu s'attendre à une croissance plus faible que prévu et à des fuites de capitaux qui se font déjà sentir sur les marchés.

Vers 10H00 GMT jeudi, le dollar a franchi le seuil des 69 roubles pour la première fois depuis avril 2016, lorsque la Russie était en proie à une crise économique et financière provoquée entre autres par les sanctions occidentales imposées en raison de la crise ukrainienne.

Par rapport à l'euro, le rouble a plongé à son plus bas niveau depuis avril dernier.

Aussitôt, la banque centrale russe a décidé de réduire la pression sur la monnaie en annonçant la suspension jusqu'à fin septembre de ses achats de devises sur le marché intérieur. Ces achats, effectués quotidiennement pour atténuer les effets de la fluctuation du marché pétrolier, pèsent sur la valeur de la monnaie russe.

«Cette décision a été prise pour accroître la prévisibilité des actions des autorités monétaires et réduire la volatilité des marchés financiers», a précisé la Banque de Russie.

Cette annonce a aussitôt entraîné un vif rebond de la monnaie russe, sous double pression ces dernières semaines, avec d'une part la baisse des devises émergentes sous l'effet de la crise financière turque, et d'autre part le renforcement des sanctions des Etats-Unis contre Moscou.

«Se débarrasser du dollar»

«Washington est prêt a durcir les sanctions contre la Russie et les prochaines pourraient entrer en vigueur en novembre», ont expliqué les analystes de la banque Alfa.

Rendues publiques début août et entrées en vigueur mercredi, les dernières sanctions américaines sont liées à l'empoisonnement d'un ex-espion russe à l'agent innervant Novitchok au Royaume-Uni.

Ces restrictions dans l'exportation de certains produits technologiques pourraient être suivies d'une nouvelle vague de sanctions présentée comme beaucoup plus douloureuse.

Les conditions imposées pour éviter un deuxième round sont «délibérément formulées afin qu'elles ne puissent pas être remplies, et tout le monde le comprend parfaitement», a réagi jeudi le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, cité par les agences russes.

«Le moment est venu de passer des mots aux actes, de se débarrasser du dollar comme moyen de paiement et de chercher d'autres moyens», a-t-il ajouté, «nous allons accélérer ce travail».

Mercredi, le président russe Vladimir Poutine avait fustigé les sanctions, les qualifiant de «contre-productives" et «dénuées de sens».

Mais ministre russe de l'Economie, Maxime Orechkine, l'a reconnu : les fuites de capitaux vont s'étendre au cours des 12 prochains mois et le rouble va baisser. «Mais nous retournerons ensuite aux mêmes tendances que nous connaissions cette année», a affirmé le ministre, ajoutant s'attendre à revoir «très légèrement à la baisse» les prévisions de croissance en 2018.

«De tous les pays ayant une économie émergente, la Russie apparaît comme l'un des plus stables et les moins sujets aux fluctuations négatives», a ajouté M. Orechkine.

La Russie, qui avait dû se déclarer en défaut sur sa dette extérieure il y a tout juste 20 ans, a suivi sous Vladimir Poutine une politique financière, monétaire et budgétaire très rigoureuse, encore durcie ces quatre dernières années dans un contexte de sanctions occidentales croissantes liées à la crise ukrainienne.