L’Allemagne ralentit mais échappe à la récession

AWP

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L’Office fédéral des statistiques a déjoué les prédictions les plus sombres en annonçant une hausse de 1,5% du PIB 2018 sur un an, contre 2,2% en 2017.

Moins étincelante que d’habitude à l’export, l’Allemagne a néanmoins aligné l’an dernier une neuvième année consécutive de croissance et un nouvel excédent budgétaire record, aidée par sa robuste demande intérieure.

Si l’économie allemande a ralenti comme attendu l’an dernier, avec une hausse de 1,5% sur un an du produit intérieur brut contre 2,2% en 2017, l’Office fédéral des statistiques a déjoué mardi les prédictions les plus sombres.

D’une part le pays a échappé à une «récession technique» en fin d’année, c’est-à-dire à deux trimestres consécutifs de recul du PIB, en enregistrant un «léger rebond» non chiffré de sa production après le repli de 0,2% au trimestre précédent, selon Destatis.

Berlin, champion de la rigueur budgétaire auprès de ses partenaires européens, a par ailleurs vu ses comptes publics (Etat, collectivités locales et sécurité sociale) gonfler d’encore 59,2 milliards d’euros, soit 1,7% du PIB, nouveau record depuis la réunification du pays en 1990.

Au total, l’Allemagne réalise certes sa «plus mauvaise performance depuis cinq ans», mais «se tire avec un simple oeil au beurre noir» des multiples incertitudes du moment, estime Carsten Brzeski, économiste de la banque ING.

Épées de Damoclès

Dans le détail, le ralentissement allemand est dû à «un mélange de facteurs temporaires», donc appelés à disparaître, et «structurels», poursuit M. Brzeski, rendant la dynamique économique des prochains mois difficile à prédire.

«Pensez seulement à la rude météo hivernale, aux arrêts maladie inhabituels dus à l’épidémie de grippe, aux grèves, au calendrier des vacances et jours fériés, au niveau très bas des principaux fleuves, mais aussi au manque d’investissement dans les infrastructures, aux retards des trains et à l’absence de réforme significative ces dix dernières années», énumère l’économiste.

La péripétie la plus marquante de 2018 est venue du secteur automobile, déjà bousculé par la désaffection pour le diesel, et qui a eu les pires difficultés à adapter sa production aux nouvelles normes européennes anti-pollution WLTP entrées en vigueur en septembre.

Et même si les constructeurs semblent avoir surmonté cette mauvaise passe, «tous les risques internationaux majeurs, du chaos du Brexit à la guerre commerciale, continuent de planer sur l’économie comme une épée de Damoclès», résume Jörg Zeuner, de la banque KfW.

L’Allemagne peut en revanche s’appuyer sur sa demande intérieure - à la fois la consommation privée et publique, ainsi que les investissements - soutenue par un taux de chômage historiquement bas (4,9%) et la nette hausse récente des salaires.

Baisses d’impôts?

Ce contexte en demi-teinte, fait d’une multitude de menaces alors que les caisses publiques débordent de plus belle, devrait stimuler le débat budgétaire dans un pays accusé depuis des années de dépenser trop peu, y compris par ses propres économistes.

«Avec un excédent de 59 milliards d’euros, la politique économique a suffisamment de munitions pour les utiliser intelligemment et dans une perspective de long terme», veut croire Jörg Zeuner, à l’unisson de la plupart des commentateurs.

La coalition gouvernementale semble pour l’heure divisée sur le sujet, le ministre social-démocrate des Finances Olaf Scholz ayant récemment estimé que «les années fastes» étaient «finies» pour les recettes publiques, réduisant les marges de manoeuvre.

A l’inverse, le ministre conservateur de l’Economie, Peter Altmaier, appelle à une véritable «politique industrielle» et des baisses d’impôts, d’autant que l’Allemagne voit son attractivité menacée par la politique fiscale très favorable aux entreprises de Washington.

«Il est temps de soutenir la croissance», estimait vendredi M. Altmaier dans le Handelsblatt, réclamant un allègement «dans l’année» de la fiscalité, tout en évoquant de possibles investissements publics allant des batteries pour automobiles à un «Airbus de l’intelligence artificielle».

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