Gonet: l'actualité des marchés au 24 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Nasdaq -0,27%, SPX -2,93%, Dow -3,04%, Russell -1,13%, SOX +3,36, Eurostoxx -2,47%, SMI -5,37%.

Wall Street rend encore du terrain à l’exception notable du secteur des semi-conducteurs. L’indice S&P500 (SPX) a désormais rendu plus de 38,2% de sa hausse de 2009 à 2020. Les aficionados de Leonardo Fibonacci savent ce que cela signifie. En bref, un niveau technique important a été cassé, qui montre la voie au SPX vers les 50% de retracement soit légèrement au-dessus des 2000 points, clôture hier soir à 2237,40. Le Dow Jones a désormais effacé tous ses gains de la période «Trump». Donald Trump qui continue à refuser un confinement de son pays, cet homme ne finira jamais de nous étonner...de son côté, le premier ministre anglais Boris Johnson a craqué et renvoyé ses concitoyens dans leurs chaumières pour une durée de trois semaines. Revenons au marché, Leonardo Fibonacci n’as pas forcément toujours raison, lui qui fait référence depuis le 12e siècle... le souci actuel réside dans le fait que les fondamentaux macro et micro économiques ne peuvent plus être pris en compte car personne ne sait précisément quel sera le bilan économique et financier de la pandémie du corona virus. Dans les salles de marchés, on se retourne donc comme un seul homme vers l’analyste technique et ce bon vieux Leonardo, what else?

Ceci dit, au risque de paraître exagérément optimiste, on peut timidement avancer que quelques signes positifs émergent doucement: l’indice VIX (de la volatilité du SPX), qui reflète le niveau de peur dans le marché, recule à 61,60, dans un marché en baisse, ce qui nous indique que les traders commencent à se positionner en vue d’un rebond. Notons par ailleurs que depuis une semaine, le VIX n’a cessé de clôturer en recul, à une exception près. Autre bon signe, l’ETF LQD (iShares iBoxx $ Investment Grade Corporate Bond ETF) rebondit de plus de 7% après les annonces de la Fed, que je vous détaille ci-dessous. On note par ailleurs le rebond du pétrole, le WTI Light Crude en progression de 5% à 24,57 dollars le baril, suite à des discussions entre saoudiens et américains en vue de stabiliser son cours. Bill Ackman parie déjà sur une reprise économique. Pershing Square a couvert ses arrières et réinvesti dans des entreprises comme Lowe’s, Starbucks, Hilton et Berkshire Hathaway au cours des 10 à 12 derniers jours. «Nous sommes longs. Pas de shorts en pariant contre le pays» indique-t-il. Pour sa part, JPMorgan convient que c’est le bon moment pour revenir aux actifs à risque, car «les portefeuilles sont sous-pondérés en termes de risque et surpondérés en termes de revenu fixe. À un moment donné, ils devront se charger d’environ 850 milliards de dollars d’actions pour maintenir l’exposition aux actifs multiples à un niveau constant», estime la banque. On note enfin des achats paniques de lingots d’or et d’argent au sein de la population des petits porteurs, population qui fait bien souvent tout à l’envers. Détenir de l’or dans une proportion mesurée dans un portefeuille est une bonne idée, se ruer dans le métal jaune en croyant y trouver son salut en est une tout autre.

Deux nouvelles majeures sont à noter hier, les annonces de la Fed et l’incapacité des élus américains à voter un plan complémentaire de soutien à l’économie des Etats-Unis. Dans une annonce surprise avant l’ouverture des marchés, la Réserve fédérale annonçe qu’elle ne fixera désormais plus de limite à ses achats de bons du Trésor et de titres hypothécaires (programme de «QE» relancé la semaine dernière). Elle annonce en outre une nouvelle série de mesures permettant à un large éventail d’entreprises d’accéder à de l’argent frais. La Fed procédera à des achats de dette «d’un montant nécessaire pour favoriser le bon fonctionnement du marché et la transmission efficace des politiques à des conditions financières plus larges et à l’économie», indique-t-elle dans un communiqué. En bref, la Fed fait du Super Mario (whatever it takes...). Du côté obscur du flux de nouvelles, le Sénat rejette hier soir le plan de soutien de l’administration Trump, qui pourrait atteindre jusqu’à 2 trillions de dollars. Le texte avait déjà été repoussé une première fois dimanche soir, faute de majorité qualifiée (60 votes sur 100 requis) en raison d’un désaccord des élus démocrates. Les discussions se poursuivent toutefois activement, même si les tensions partisanes empoisonnent les débats malgré l’urgence de la situation.

Le billet vert fait une pause, après plus d’une semaine d’ascension fulgurante, les investisseurs ayant fui les autres devises, notamment celles des marchés émergents, pour se réfugier vers la devise américaine.

Le dollar index DXY revient ce matin à 101,57, il a grimpé de plus de 4% la semaine dernière et de 8% depuis le 9 mars, très recherché par les investisseurs en mal de liquidités. La paire eur/usd à 1,0830.

Boeing (BA US) récupère 11%, Goldman Sachs est passé à l’achat sur le géant de l’aéronautique, jugeant que la chute de près de 70% du titre depuis début février crée une opportunité. Walmart (WMT US +0,27%) va augmenter les salaires d’entrée de 2 dollars de l’heure pour les employés de ses entrepôts. Amazon (AMZN +1,7%) annonce une augmentation des salaires sur les heures supplémentaires pour les employés travaillant dans ses entrepôts aux Etats-Unis alors que le numéro un mondial de la distribution en ligne voit ses commandes exploser. Netflix (NFLX) décolle de 8,2%, le titre est relevé de neutre à superformer chez Baird, qui note d’importantes nouvelles souscriptions.

En Europe, Santander va décaler le versement de son dividende à l’année prochaine pour protéger ses liquidités. Roche va renforcer ses capacités de fabrication pour «maximiser la production d’Actemra partout où c’est possible». Le laboratoire et certaines entreprises tierces testent le traitement par voie intraveineuse sur des patients adultes sévèrement touchés par la pneumonie provoquée par le Covid-19. AB Inbev renonce à ses objectifs 2020 et espère boucler la transaction de cession de sa division australienne à ASAHI au second trimestre. Dans son rapport annuel Nestlé ne donne pas vraiment de nouvelles informations sur l’avenir de ses 23,2% dans le capital de L’Oréal. La firme de Vevey précise qu’elle  suit en permanence les performances et les options stratégiques que lui offrent le Français. Rien ne bouge donc.

Plus personne n’en doute, les jeux olympiques de Tokyo seront au mieux reportés. L’Angleterre fait enfin ce qu’il faut pour stopper le virus au plus vite, de nombreux états des Etats-Unis n’écoutent pas Donald Trump et ordonnent le lock down, la planète fait progressivement ce qu’il faut pour que nous ne restions pas tous indéfiniment chez nous. Cela se ressent dans le sentiment du marché, cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent tous dans le vert avec la palme à Séoul, qui progresse de plus de 8%, suivie de près par Tokyo. La FED a également marqué les esprits avec son plan «à la Draghi» et personne ne doute que le plan de soutien à l’économie des Etats-Unis sera rapidement voté par les élus américains. Le future SPX progresse de 4,3% alors que les indices européens sont indiqués en hausse de 4,8%.

Nous le disons depuis quelques temps déjà, avant toute considération économique, c’est la progression du virus qui reste le chef d’orchestre des marchés financiers. En Italie, pour la seconde journée d’affilée, le nombre de nouveaux cas tend à diminuer. Les officiels transalpins appellent à prendre cela avec prudence mais le marché l’a remarqué, dont le sentiment peut si rapidement revenir de la peur à la cupidité, à suivre de près donc, tout en gardant la tête froide.

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