Dynamique des obligations vertes

Gordon French, HSBC

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Les dernières nées des marchés de capitaux ont connu une croissance spectaculaire.

Le marché des obligations vertes a plus de dix ans d'existence et atteindra bientôt l'âge adulte. Une fois qu'il aura atteint sa maturité, ce marché constituera une source essentielle croissante de capital pour les projets qui aideront l'économie mondiale à limiter l'impact du changement climatique.
Jusque-là, ses premiers pas n'ont pas toujours été simples. La toute première «obligation verte», émise à hauteur de 600 millions d’euros en juillet 2007, n'a pas été suivie de beaucoup d'autres obligations du même type pendant plusieurs années. Il a fallu attendre 2013 pour que l'émission d'obligations vertes atteigne les 10 milliards de dollars par an, un chiffre très faible comparé à l'ensemble du marché des obligations.

Bond de 50% en un an

Cependant, dix ans plus tard, le dernier né des marchés de capitaux a connu une croissance spectaculaire. En 2017, la valeur des obligations vertes émises a atteint plus de 120 milliards de dollars, c'est-à-dire environ 50% plus du montant émis en 2016. Ce montant comprenait une obligation verte émise par la France en janvier 2017de 7 milliards d’euros sur 22 ans, une étape majeure en termes de volume et de durée, et d'autant plus remarquable que la demande des investisseurs, qui s'élève à plus de 23 milliards d’euros, dépasse de loin le volume de l'offre.

Des injections considérables de capitaux sont nécessaires
pour financer les infrastructures rejetant moins de carbone.

Le changement climatique représente une menace imminente pour la planète et des injections considérables de capitaux sont nécessaires pour financer les infrastructures et technologies rejetant moins de carbone. Pensez aux éoliennes et aux centrales solaires photovoltaïques. Pensez aux systèmes de transport à faible émission de carbone. Pensez aux technologies qui permettront aux immeubles, et à des villes entières, d'économiser de l'eau et de l'énergie.
Le marché des obligations vertes est peut-être en retard, mais il est désormais essentiel de financer une économie plus respectueuse de l'environnement. Cela permet aux entreprises d'exploiter les réserves de liquidités mondiales, c'est-à-dire de chercher des opportunités d'investissement respectueuses du climat, en convertissant ces fonds en capitaux pour des projets écologiquement durables.

Moins de 1% du marché mondial des obligations

Actuellement, les obligations vertes représentent encore moins de 1% de l'ensemble du marché mondial des obligations. Mais voici les raisons pour lesquelles nous pensons que le marché se développe rapidement:

  • Tout d'abord, de profonds changements ont eu lieu dans la façon dont les entreprises, les consommateurs et les investisseurs perçoivent les risques engendrés par la pollution et l'augmentation des températures au niveau mondial. L'Accord de Paris de 2015 a établi un consensus mondial dominant sur la nécessité de s'occuper du changement climatique. Les quelque 200 signataires ont dû développer leur propre plan national pour atteindre les objectifs visant à limiter la hausse des températures à deux degrés Celsius maximum par rapport à l'ère préindustrielle. Cela a permis de galvaniser les investissements et le financement des technologies vertes au niveau mondial.
  • Ensuite, les avancées technologiques proposent de plus en plus de solutions à faible émission de carbone économiquement viables, que ce soit les technologies énergétiques alternatives ou les véhicules et batteries électriques. Les investissements verts deviennent de plus en plus sûrs, éthiquement et financièrement parlant.
  • Enfin, les autorités chinoises et indiennes ont apporté tout leur soutien pour que leurs économies soient plus respectueuses de l'environnement. En lançant les obligations vertes pour la première fois en 2015, les institutions chinoises et indiennes ont apporté une diversité géographique à un marché qui avait jusqu'alors été dominé par la Scandinavie, les États-Unis et la Grande-Bretagne. En 2017, des obligations vertes d'une valeur supérieure à 30 milliards de dollars ont été émises par la Chine. Cela représente environ un quart du total au niveau mondial, selon des résultats fournis par Dealogic. Les volumes indiens sont plus modestes, avec un peu plus de 4 milliards de dollars en 2017, mais le pays est également en train d'évoluer vers un changement radical dans les technologies à faible émission de carbone.
Le scepticisme persiste quant au «caractère vert»
de certaines obligations.

La dynamique grandissante qui anime les obligations vertes signifie que les émetteurs et les investisseurs ne peuvent plus se permettre de les ignorer.
Il est vrai que le scepticisme persiste quant au «caractère vert» de certaines obligations. Les bénéfices sont-ils réellement utilisés pour financer des projets environnementaux ou liés au climat? Ou bien sont-ils dirigés vers des projets ou des entreprises dont le «caractère vert» est discutable? Qui décide si une émission particulière est aussi «verte» qu'une autre? Beaucoup d'investisseurs sont encore découragés par le manque de cohérence et de transparence dans ces domaines, tandis que les émetteurs sont encore frileux quant aux efforts et aux coûts supplémentaires à fournir pour divulguer, rapporter et certifier les initiatives «vertes».

Des progrès sur la standardisation et le contrôle

Mais ces extras ont tendance à être surestimés et des progrès sont faits en ce qui concerne la standardisation et le contrôle. Par exemple, en avril 2017, Standard & Poor’s a lancé un outil conçu pour évaluer non seulement le caractère vert d'une obligation, mais également à quel point elle est écologique.
En attendant, les avantages liés aux émissions d'obligations vertes sont considérables, même s'ils ne sont probablement pas aussi reconnus qu'ils le devraient.
Pour commencer, l'émission d'obligations vertes permet aux entreprises d'exploiter la demande croissante de tels instruments parmi les fonds de pension, les fonds souverains et d'autres investisseurs inquiets de l'exposition de leur portefeuille aux activités et émetteurs non durables et peu respectueux de l'environnement De même, une enquête de HSBC a révélé que les deux tiers des investisseurs institutionnels mondiaux souhaitaient injecter plus de capitaux dans les investissements liés au climat et à la réduction des émissions de carbone.

Ancrer la pensée «faible en carbone»

Par ailleurs, le lancement d'une obligation verte permet à l'émetteur de prouver qu'il est conscient et préparé aux défis à long terme liés au réchauffement climatique. Ainsi, en leur demandant d'identifier, de minimiser et de contrôler leur profil de risque climatique, cela peut leur permettre d'ancrer la pensée «faible en carbone» dans leur culture d'entreprise et leur stratégie commerciale. Sur le long terme, cela pourrait bien procurer un avantage par rapport aux entreprises moins préparées en termes d'expertise et de prospects commerciaux.
Compte tenu de l'enjeu, l'avènement du marché des obligations vertes ne peut qu'être le bienvenu.