A marquer d’une pierre blanche

Nicolette de Joncaire

2 minutes de lecture

Melchior de Muralt: «L’heure n’est plus aux pionniers. La finance durable appartient au main stream».

Le coup d’envoi sera lundi. Une semaine entière consacrée à Genève au financement des objectifs du développement durable (ODD)  et à la rencontre entre place financière, autorités fédérales et institutions internationales, culminant jeudi avec le Building Bridges Summit. Qu’en dit Melchior de Muralt, pionnier de cette finance durable suisse qui sera à l’honneur?

Cet évènement marque-t-il une étape?

Il n’y a aucun doute. Il est le signal d’une dynamique nouvelle qui marque l’avènement d’une Suisse, «place financière du développement durable», qui saura innover dans une gestion d’actifs avec un biais résolument tourné vers une économie viable. Bravo à ceux qui rassemblent les forces vives de la finance responsable et du financement des Objectifs de Développement Durable définis par les Nations-Unies. Il faut célébrer que tous les acteurs, grands et petits, jouent le jeu. De Patrick Odier – chef d’orchestre de cette réunion – à Sergio Ermotti qui vient consacrer l’adhésion de Zurich.

La Suisse possède deux places financières
très complémentaires.
La finance durable sort donc de son statut de niche pour devenir «main stream»?

C’est exactement cela. Il faudra 2500 milliards de dollars  chaque année pour mener à bien l’agenda du développement durable des Nations-Unies. Les capitaux publics sont insuffisants. Il est donc devenu indispensable que les capitaux privés soient mobilisés, pour autant qu’ils soient structurés pour financer des solutions durables et rentables. La Suisse – et j’entends ici Genève aussi bien que Zurich – est très bien placée pour apporter son expertise dans ce domaine et contribuer à réorienter les marchés financiers vers des solutions d’investissement à fort impact positif. Aux financiers de mettre leurs talents au service de la construction de structures qui offrent aux investisseurs la liquidité et le rendement qu’ils en attendent.

La mesure de l’impact ne doit-elle pas rester au cœur de ces structures?

C’est effectivement une priorité absolue et il faudra rester très vigilant pour ne pas décrédibiliser la place.

Quels sont les points forts de la Suisse pour mener à bien cette mission?

La Suisse possède deux places financières très complémentaires. Zurich abrite deux géants bancaires aux talents multiples et un secteur extraordinairement puissant et innovant de l’assurance et de la réassurance. On y trouvera toutes les compétences nécessaires à structurer des formules novatrices, aptes à financer les ODD. Genève est le centre de la banque privée et représente une part substantielle du négoce des matières premières, sans oublier qu’elle abrite les Nations-Unies et un nombre important d’agences internationales. Il lui faut désormais se renouveler pour devenir créatrice dans une gestion d’actifs tournée vers la finance d’impact et atteindre le statut de centre mondial du financement des ODD.

La finance, ce n’est pas un savoir-faire, c’est d’abord un but…
celui de contribuer au bien-être de tous.
Avec BlueOrchard et avec les fonds d’engagement Cadmos, vous êtes vous-même un pionnier de la finance durable.

L’heure n’est plus aux pionniers. Elle est au main stream. La finance durable doit dominer la finance tout court.

La reprise d’une part majoritaire de BlueOrchard par Schroders est-elle un signe?

Elle est emblématique. BlueOrchard est le pionnier de la microfinance et de l'impact investing et la société a été créée sur une initiative des Nations-Unies. Schroders est un groupe international de gestion d’actifs des plus dynamique. Cette association est le signe clair que la finance d’impact est aujourd’hui partie intégrante du corps principal de la finance.

Vous avez évoqué à plusieurs reprises la nécessité d’une finance novatrice. Avez-vous des exemples en tête?

Oui, je pense en particulier à ce qu’on appelle Blended Finance (ndlr: Financement Mixte en français) dont vous trouverez de multiples exemples chez BlueOrchard justement. Il implique le coinvestissement de fonds publics et privés à travers un plan d'investissement commun dans lequel chaque tranche est définie en fonction du type d’investisseurs concernés. Une tranche equity pour les investisseurs stratégiques et une tranche mezzanine pour les investisseurs sociaux par exemple.  Ces produits sont complétés par une poche d’assistance technique financée par les agences de développement. Pour les fondations comme pour les multinationales, ce sont de remarquables véhicules de placement.

Pour vous, ces journées sont une victoire.

La finance, ce n’est pas un savoir-faire, c’est d’abord un but… celui de contribuer au bien-être de tous. Ramenons le capital là où il est nécessaire.