Les ordinateurs, de meilleurs investisseurs?

Salima Barragan

2 minutes de lecture

«Bien programmés, les ordinateurs peuvent être meilleurs que les traders», déclare Michael Frainkin d’Invesco.

Les ordinateurs sont-ils de meilleurs investisseurs? C’est la question à laquelle Michael Frainkin, responsable de la recherche chez Invesco, tente de répondre à travers son livre «Computers are only human» co-écrit avec Bernard Langer. Pour l’auteur, les ordinateurs sont le reflet de l’homme…avec ses défauts en moins. Plongée au cœur de l’univers de l’investissement factoriel.

«Computers are only human»; que signifie cet oxymore?

Lorsque nous créons des algorithmes, nous y insérons notre intuition humaine – qui est l’essence de l’homme – dans les lignes de code. Les ordinateurs exécutent ce que les hommes leur ordonnent. Ils sont donc notre reflet, mais j’ai constaté un étrange respect vis-à-vis des ordinateurs…

Le trader typique de l’époque
n’existe plus!
Avons-nous tendance à dédaigner l’impulsion humaine derrière la révolution informatique?

Nous ne pourrions envisager la finance moderne sans ordinateurs. Sans leur puissance de calcul, nous n’aurions pas pu aboutir à de telles connaissances académiques, spécialement dans le contexte d’apprentissage machine. Les ordinateurs ont changé la façon dont les marchés traitent. Le trader typique de l’époque n’existe plus! La finance et les connaissances évoluent sans cesse, mais les hommes ont dû parcourir du chemin pour en arriver là. Pour cette raison, j’ai souhaité apporter ma contribution sur le sujet.

Les ordinateurs sont-ils de meilleurs investisseurs?

Les investisseurs systématiques sont de meilleurs investisseurs et les portefeuilles diversifiés sont de meilleurs portefeuilles. Or, sans ordinateurs, il est difficile d'être systématique et diversifié tout en prenant correctement en compte les coûts de transaction. Programmés correctement, les ordinateurs sont de toute évidence de meilleurs traders. Si je reformule la question à poser, je pense que le quant moyen est meilleur que le gestionnaire traditionnel moyen. Mais je vous l’accorde, vous avez du bon et du mauvais dans les deux camps et vous trouverez de très bons managers parmi les quants et les traditionnels.

Pourquoi considérez-vous l’investissement factoriel comme l’apogée de la finance?

C’est notre compréhension qui mène les marchés. Traditionnellement, les analystes se cantonnent à communiquer avec des sociétés, donnent leurs recommandations sur un nombre de titres au lieu d’un portefeuille. Leurs analyses ne sont pas basées sur des données mais sur des opinions. Je ne dis pas qu’ils ne peuvent pas être couronnés de succès, d’ailleurs certains le sont…Mais en moyenne, force est de constater, qu’il y a des coûts et des erreurs. De nouvelles compétences sont disponibles et il y a un bel avenir pour l’investissement factoriel.

Certains obstacles artificiels amènent des frictions sur le marché,
d’où le succès de la stratégie de basse volatilité.
Quelle est votre approche quantitative?

Comme point de départ, je cherche à comprendre pourquoi certains facteurs ont du sens et pour quelles raisons ils ont fonctionné. Par exemple, les marchés sont inefficients pour des raisons structurelles. La finance comportementale a clairement démontré que les agissements des investisseurs sont faussés à cause de l’effet de masse. Pour cette raison, la stratégie «momentum» marche bien. Aussi, certains obstacles artificiels comme des restrictions d’investissement, les droits de timbre, les interdictions d’effet de levier ou de ventes de titres à découvert amènent des frictions sur le marché, d’où le succès de la stratégie de basse volatilité. Avec nos connaissances, nous testons les données, mais également nos hypothèses, pour éviter de tomber dans l’écueil de la chance.

A quels défis éthiques la finance moderne est-elle confrontée?

Il s’agit d’intégrer des considérations de durabilité dans les processus investissement, avec un équilibre entre les rendements et les bénéfices à la société. Prenons l’exemple du «high frequency trading», une discipline quantitative. Chaque gains engendre une perte, ce qui n’apporte absolument rien à la société. Les marchés devraient allouer le capital de façon appropriée. Or, actuellement, c’est la vision court-termiste qui l’emporte sur les considérations à plus long terme. Chaque investisseur, à travers ses actions, devient le propriétaire de l’économie. Doit-il investir pour un meilleur couple risque rendement, ou pour atteindre également d’autres objectifs à long terme?