Le rejet du Parlement britannique signifie qu’il ne veut pas du tout du Brexit, estime Sandra Crowl de Carmignac.
Le moment est critique. Les facteurs politiques se multiplient, obscurcissant les perspectives économiques internationales. De cette confusion, Sandra Crowl, membre du Comité d'Investissement de Carmignac, tente de tirer une vision structurée du futur.
La situation se présente sous trois aspects, structurel, conjoncturel et cyclique. Structurellement, les Etats-Unis tendent à se replier sur eux-mêmes. Ils ont la capacité de se désengager et de devenir moins dépendants du cycle mondial ce que vise leur stratégie de protectionnisme actuel. Sur le plan de la conjoncture, la détérioration de leur compte courant est largement un héritage de la période précédant l’instauration des tarifs douaniers. Il est encore difficile de juger quel sera l’impact des mesures prises et, encore davantage, celui des négociations en cours. Au terme de dix ans de reprise, la fin du cycle économique est perceptible. Cette fin a été retardée par le stimulus fiscal de 2017 qui a permis une hausse de 15% des dépenses d’investissement des entreprises mais cette bouffée d’air est terminée car la trésorerie des sociétés s’affaiblit. D’autant que les salaires horaires moyens ont augmenté de 3,4% ce qui rétrécit les marges. Les perspectives ne sont toutefois pas particulièrement sombres. Malgré des chiffres récents plus moroses qu’attendu en matière de créations d’emploi, largement dus aux premiers effets de la fermeture partielle de l’administration en janvier (shutdown), la confiance des consommateurs est au rendez-vous. L’un des facteurs possibles d’instabilité reste le fléchissement des prix et des ventes de l’immobilier. Il faut toutefois souligner que le taux hypothécaire, monté de 3,8 à 4,8% sur un an est redescendu à 4,4% et que la Réserve fédérale est prudente. La croissance du PIB devrait se situer entre 2 et 2,5%.
Il devrait se stabiliser autour de 3’800 milliards de dollars. Il faudra cependant surveiller la pression sur le dollar en fin d’année.
Les deux pays ont fondamentalement besoin de résoudre leurs conflits et certains points clefs sont en bonne voie. La Chine s’ouvrira à l’achat des biens agricoles et de l’équipement lourd américain et s’engagera à ne pas laisser sa devise chuter. Les tarifs douaniers pourraient même, au final, se retrouver au point où ils se situaient avant les hausses tarifaires exigées par les Etats-Unis. Par contre, resteront à résoudre les problématiques associées au droit de la propriété intellectuelle ce qui prendra encore du temps.
en réduisant les impôts et la TVA.»
La baisse de la croissance chinoise est normale et voulue. L’intention est claire: tourner l’économie vers la consommation domestique. A noter, l’envolée de crédit du mois de janvier est largement redevable aux dépenses du Nouvel An chinois dont l’effet se lissera sur les mois suivants. Si l’effort de désendettement est effectivement plutôt en baisse, il ne faut pas, pour autant, imaginer un retour aux dépenses stériles d’infrastructure du passé. Sur les quelques 200 milliards de dollars d’investissement budgétés, 170 milliards seront affectés au développement du réseau ferroviaire. Le gouvernement cible les consommateurs en réduisant les impôts et la TVA. D’ailleurs, on commence à observer une hausse de l’endettement des ménages, un signe de confiance, malgré une crainte évidente de la montée des droits de douane.
Les actions A chinoises ont très bien performé sous la pression d’un marché local très spéculatif. Il faut sans aucun doute rester prudent mais rester positionné sur certains types de valeurs qui offrent un potentiel de long terme comme la technologie, les nouveaux trends de consommation ou encore la monétisation d’une diversification comme le fait jd.com.
L’état de santé de l’Europe dépend de celui de la Chine qui est son premier partenaire commercial. Lorsque le sentiment (exprimé dans les PMI) grimpe en Chine, il remonte aussi en Europe. L’industrie automobile allemande – et c’est vrai aussi de l’industrie automobile italienne ou espagnole - a souffert des nouvelles normes d’émission à effet de serre de l’Union mais aussi de la déficience de navigabilité du Rhin suite au manque d’eau en été dernier. On observe aussi un effet domino: suite au fléchissement de l’Allemagne, les PMI en Pologne sont passés de 55 à 48 en 7 mois. Il me parait néanmoins que nous voyons le bout du tunnel. Le sentiment en Suède, toujours précurseur, est en amélioration.
Nous sommes au sommet de l’émotion. Mais, et nous l’avons toujours pensé, le Brexit n’aura pas lieu. Le rejet par le Parlement britannique de l’accord négocié par le gouvernement signifie en vérité qu’il ne veut pas du Brexit. Qu’elle invoque l’article 50 ou qu’elle ouvre un second référendum, la Grande-Bretagne ne sortira pas de l’Union européenne.