Guerre contre la pollution

Nicolette de Joncaire

2 minutes de lecture

Les opportunités de la lutte contre l’asphyxie environnementale en Chine avec Karine Hirn de East Capital.

 

Pollution de l’air, de l’eau, des sols, de l’alimentation: 30 ans de développement à marche forcée… sans une pensée pour les externalités. La prise de conscience relativement récente du public est plus que largement liée aux médias sociaux. Au grand dam du gouvernement chinois d’alors, lorsqu’en 2009, l’Ambassade des Etats-Unis commençait à dénoncer via Twitter le niveau de pollution à Beijing (parfois jusqu’à 20 fois plus élevé que les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé). Il n’y a toutefois qu’en Chine qu’un documentaire sur la pollution de l’air pouvait gagner plus de 300 millions de vues en moins de 4 jours comme ce fut le cas de «Under the Dome», le film autofinancé de Chai Jing et largement diffusé sur les réseaux sociaux en 2015 . De «vérité qui dérange» , la pollution est passée au rang de lutte nationale. Aux grand maux les grands remèdes. «Il est important de protéger l'environnement tout en poursuivant le progrès économique et social – pour parvenir à l'harmonie entre l'homme et la nature, et à l'harmonie entre les sociétés humaines»  déclarait Xi Jinping à Davos en janvier 2017. La guerre contre la pollution décrétée par le gouvernement chinois est positive pour l’environnement. Elle l’est aussi pour qui sait y investir nous explique Karine Hirn, co-fondatrice de East Capital.

Vous avez vécu plusieurs années à Shanghai. La situation est-elle si difficile à vivre?

Oui, on se méfie de tout. Les étals des marchés sont tentants mais difficile d’y acheter quoi que ce soit sans craindre d’ingérer certains pesticides particulièrement nocifs pour la santé. Plus de 30% de l’eau en Chine n’est pas potable et les deux tiers du pays manquent d’eau. Une journée passée à Beijing équivaut en moyenne à fumer quatre cigarettes. Occasionnellement, deux paquets entiers.

La plus grande partie des placements se fait dans les énergies vertes
et la chaîne de valeur des transports électriques.
Quel montant les Chinois investissent-ils dans la lutte contre la pollution?

De l’ordre de 350 milliards de dollars par an, soit la moitié des investissements mondiaux dans ce domaine. Sous forme de subventions, de réductions fiscales ou d’incitations plus ou moins musclées, le gouvernement contraint les entreprises à améliorer leur bilan et leur impact environnemental. Au 19e congrès du Parti, en octobre dernier, le président Xi Jinping réaffirmait sans ambiguïté son engagement au développement vert.

Quelques exemples?

Dans le domaine automobile, la Chine avait pris un certain retard. Ce retard appartient au passé: la Chine est depuis 2015 le premier marché des véhicules électriques; et à Shenzhen par exemple, tous les bus sont électriques. Plus de 16'000 véhicules servent la ville. A Kunming aussi, tout est électrisé. L’ambiance y est devenue si silencieuse qu’elle en est presque irréelle.  A partir de 2030 , la production de véhicules à combustion sera bannie. Pour assainir les grandes villes, les entreprises doivent délocaliser ou fermer.

Comment investissez-vous sur cette tendance?

Notre gérant, François Perrin, ancien de BNP Paribas et de Lombard Odier, est un vrai spécialiste de ce thème, très technique en raison de la réglementation complexe qui le gouverne et la nécessité de comprendre les diverses technologies. Nous avons identifié plus de 350 entreprises qui produisent des biens et services correspondant à ce thème. La plus grande partie des placements, soit à peu près 35 positions, se fait dans les énergies vertes et la chaîne de valeur des transports électriques. Ces deux segments représentent plus de la moitié des actifs mais nous investissons également dans l’efficience énergétique, le traitement de l’air et de l’eau ainsi que dans le recyclage des déchets.  Il s’agit, à nos yeux, de l’une des stratégies les plus convaincantes du marché chinois.

Les investissements sont-ils onshore ou offshore?

Plus de la moitié des actions sont négociées onshore, sur le marché de Shenzhen (environ 40%) et sur celui de Shanghai (environ 16%). La partie offshore, soit un peu plus de 40%, provient de la bourse de Hong Kong. Nous tirons pleinement partie de la réforme du marché financier et des connexions Shanghai/Shenzhen – Hong Kong.

Il s’agit du premier portefeuille thématique d’East Capital?

C’est effectivement le premier et il a obtenu le LuxFLAG Climate Finance Label ce qui signifie qu’il est reconnu comme une contribution crédible à la lutte internationale contre le changement climatique.